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AnalyseAccord NPD-PLC : on s’est aimés comme on se quitte?

Jagmeet Singh en gros plan.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

L’entente entre le Nouveau Parti démocratique (NPD) et le Parti libéral du Canada (PLC) a toujours été destinée à être brisée. Mais contrairement à la chanson de Joe Dassin, quand les néo-démocrates ou les libéraux décideront du moment de la rupture, ce ne sera pas « sans penser à demain », mais précisément parce qu’ils auront en tête l’avenir de leur parti.

Quoi qu’il advienne de cet accord, les électeurs peuvent dormir tranquilles : les chances qu’ils se rendent aux urnes à court terme demeurent encore très minces. Dans certains coins du monde, le 1er mars est la journée officielle du compliment.

Sur la colline du Parlement à Ottawa cette année, la date pourrait toutefois marquer la fin de la courtoisie entre deux partis qui se sont cajolés depuis deux ans, mais qui pourraient bien reprendre officiellement les hostilités.

Mardi, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a de nouveau brandi la menace de se retirer de l’entente si les libéraux n’accèdent pas à ses demandes dans le dossier de l’assurance médicaments d’ici le 1er mars.

Le ballon est dans leur cour, a-t-il déclaré en point de presse. Si les troupes de Justin Trudeau ne respectent pas leur promesse, il y aura des conséquences, a-t-il tranché. En d’autres mots : les libéraux ne pourront plus compter sur l’appui inconditionnel des néo-démocrates pour faire avancer leur agenda législatif et assurer la survie du gouvernement jusqu’en 2025.

L’entente de soutien et de confiance entre les deux partis stipule notamment que le gouvernement doit continuer de progresser vers la mise en œuvre d’un régime universel d’assurance médicaments en adoptant une loi sur l’assurance médicaments du Canada d’ici la fin de 2023.

Jagmeet Singh serre la main de Justin Trudeau.

Jagmeet Singh serre la main de Justin Trudeau. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Les néo-démocrates ont déjà accepté de repousser la date butoir au 1er mars. S’ils ont fait preuve de flexibilité une fois, accorder un deuxième sursis les placerait en position de faiblesse et ils veulent éviter à tout prix d’avoir l’air des chiens de poche des libéraux.

Dès la signature de l’entente, les néo-démocrates étaient parfaitement conscients que le dossier de l’assurance médicaments serait un défi.

On n’était pas naïfs, mais on se disait qu’on allait pouvoir les pousser sur ce dossier.

Une citation de Une source néo-démocrate

L’objectif n’a jamais été d’obtenir de l'argent sonnant pour un programme pancanadien d’assurance médicaments, mais plutôt de faire progresser le dossier, ne serait-ce que d’une étape, selon cette personne. Les néo-démocrates plaident pour un régime d’assurance entièrement public et universel, une formule à laquelle les libéraux sont peu favorables compte tenu des coûts importants qui seraient liés à un tel programme.

Un rapport commandé par les libéraux en 2019 indiquait que le coût supplémentaire net pour couvrir les médicaments essentiels s'élèverait à environ 3,5 milliards $ par an.

Autre point de friction : le NPD fait pression pour que certains médicaments soient entièrement couverts à court terme. Mardi, le ministre de l’Immigration Marc Miller a évoqué des demandes du NPD faites en privé qui sont à ses yeux déraisonnables.

Qui partira le premier?

Au moment où Justin Trudeau est au plus bas dans les intentions de vote, des néo-démocrates font valoir en coulisses que de mettre fin à l’entente leur permettrait de se différencier des libéraux.

Ils perdraient toutefois une partie importante de leur influence et pourraient compromettre d’autres projets de loi qui leur tiennent à cœur, comme celui contre les briseurs de grève. Cela laisserait davantage de place au Bloc québécois, qui pourrait à son tour s’entendre à la pièce avec le gouvernement et faire des gains politiques qui pourraient résonner auprès de l’électorat québécois.

D’ailleurs, le chef bloquiste se frottait les mains mardi en songeant à cette éventualité. Si le gouvernement se retrouve dans le trouble, on pourra avoir d’autres exigences. On pourra négocier des éléments qui sont bons pour le Québec, a-t-il indiqué. De quoi alimenter la réflexion des néo-démocrates.

Your time is up?

Le degré de préparation pour d’éventuelles élections est un autre élément qui pourrait précipiter ou retarder la fin de l’entente. Mais ce n’est pas parce que l’entente prend fin que des élections seraient nécessairement provoquées.

En 2009, alors que les conservateurs de Stephen Harper étaient minoritaires, le chef libéral d’alors, Michael Ignatieff, avait bombé le torse en déclarant à Harper que son temps était compté.

Ces quelques mots, Mister Harper, your time is up, prononcés en anglais en marge du caucus, laissaient présager un nouveau scrutin de façon imminente. Or, les élections n’ont finalement été déclenchées que 20 mois plus tard, Stephen Harper ayant eu recours à l’appui ponctuel des autres partis d’opposition pour se maintenir au pouvoir.

La relation privilégiée entre le NPD et le PLC constitue certes un rempart supplémentaire contre un déclenchement hâtif d’élections générales pour l’instant. Mais la fin de l’entente ne signerait probablement qu’un retour à la dynamique des gouvernements minoritaires tels qu’on les connaît traditionnellement au pays, avec des ententes au cas par cas avec les partis d’opposition à qui cela convient.

Voué à l’échec

De l’aveu même de ceux qui ont signé l’accord, il est invraisemblable qu'il perdure jusqu’en juin 2025, comme c’est pourtant écrit noir sur blanc.

Si ce sont les libéraux qui y mettent un terme, c’est qu’ils voudront choisir le moment qui leur convient pour plonger le pays en élections. Au vu des sondages qui les placent régulièrement 15 points derrière les conservateurs, cette option s’avère peu probable à court terme.

Si ce sont les néo-démocrates qui mettent fin à l'entente – que ce soit sur la question de l’assurance médicaments ou sur autre chose –, c’est qu’ils voudront prendre leurs distances par rapport à un gouvernement devenu impopulaire et affûter leurs armes en vue d’une prochaine campagne électorale.

L’entente entre le NPD et le PLC allait être déchirée un jour ou l’autre. Les seules inconnues étaient de savoir quand et par qui. Les réponses à ces questions pourraient surgir dans moins de trois semaines.

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